Ellen Raskin

The Westing Game

Les Tours du Soleil Couchant

Le soleil se couche à l’ouest (tout le monde sait ça), mais les Tours du Soleil Couchant faisaient face à l’est. Étrange:!

Les Tours du Soleil Couchant faisaient face à l’est et n’avaient pas de tours. Tout de verre et de scintillance, cet immeuble d’appartements se dressait seul sur la rive du lac Michigan, du haut de ses cinq étages. De ses cinq étages encore inoccupés.

Et puis, un jour (qui s’avéra être le 4 juillet), un garçon de courses pas comme les autres parcourut la ville à vélo pour glisser une lettre sous les portes des futurs locataires. Des lettres signées Barney Nordrup.

Le garçon de courses avait soixante-deux ans, et Barney Nordrup n’existait pas.

Chers chanceux::

Le voilà enfin, l’appartement de vos rêves:! À un loyer abordable, dans la résidence la plus récente et la plus luxueuse du lac Michigan::
Les Tours du Soleil Couchant

• Fenêtres panoramiques dans toutes les pièces
• Portier en uniforme, service de ménage
• Climatisation centrale, ascenseur ultra-rapide
• Quartier privilégié, proche d’excellentes écoles
• Etc., etc.
Il faut le voir pour le croire. Ces appartements extraordinaires sont à visiter exclusivement sur rendez-vous. Il n’en reste que quelques-uns, alors ne tardez pas:!!! Appelez-moi sans attendre au 276–7474 pour profiter de cette affaire en or.

Votre obligé,
Barney Nordrup

P.-S. Je loue aussi des espaces idéalement conçus pour::
• Un cabinet médical
• Un café avec entrée sur le parking
• Un restaurant chic, sur tout le dernier étage

Six lettres furent déposées, seulement six. Six rendez-vous furent pris, et l’un après l’autre, famille après famille, bla bla bla, Barney Nordrup fit visiter les coins et recoins des Tours du Soleil Couchant.

« Regardez-moi ces vitres. Elles sont sans tain, dit Barney Nordrup. Vous pouvez voir dehors mais de dehors, personne ne peut vous voir.:»

Levant les yeux, les Wexler (premier rendez-vous de la journée) furent aveuglés par le soleil matinal qui illuminait la façade du bâtiment.

« Vous voyez ces lustres:? C’est du cristal:!:», lança Barney Nordrup en lissant sa moustache noire, puis rajustant sa cravate multicolore devant les nombreux miroirs du hall de l’immeuble:: « Et cette moquette, hein:? Sept centimètres d’épaisseur:!

— Magnifique:!:», répondit Madame Wexler, qui s’agrippait au bras de son mari car ses hauts talons vacillaient dans les longues fibres.
Elle aussi jeta un coup d’œil approbateur à son reflet avant que les portes de l’ascenseur ne s’ouvrent.

« Vous avez de la chance, déclara Barney Nordrup. Il ne me reste qu’un seul appartement, mais vous allez l’adorer. Il est fait pour vous:!:» Il ouvrit grand la porte de l’appartement 4C. « Alors, c’est à couper le souffle, ou c’est à couper le souffle:?:»

Madame Wexler en resta bouche bée:; c’était en effet à couper le souffle. Deux des murs du salon étaient vitrés du sol au plafond. Emboîtant le pas à Barney Nordrup, elle lança joyeusement nombre de « ah:» et de « oh:» à travers l’appar­tement.

Son mari, qui suivait, avait l’air moins enthousiaste.

« C’est quoi ça, une chambre ou un placard:? demanda Jake Wexler, en inspectant la dernière pièce.

— C’est une chambre, bien sûr:! répondit sa femme.

— Ça ressemble à un placard.

— Allons, Jake, cet appartement est parfait pour nous, vraiment parfait:», soutint Grace Wexler dans un roucoulement geignard. La troisième chambre était sans doute un peu petite, mais ça irait très bien pour Turtle. « Et pense à ce que ça fera d’avoir ton cabinet dans le même immeuble. Finis les allers-retours en voiture pour aller au travail:; plus besoin de tondre la pelouse ou de déneiger l’allée:!

— Permettez-moi de vous rappeler, fit Barney Nordrup, que le loyer ici est plus bas que ce que vous coûte l’entretien de votre maison actuelle.:»

Jake se demanda comment il pouvait savoir ça.Grace se tenait devant la baie vitrée qui, au-delà de la route, au-delà des arbres, donnait sur le lac Michigan, calme et brillant. Une vue sur le lac:! Attendez un peu que ses soi-disant amies avec leurs belles demeures voient cet endroit. Il faudrait faire retapisser le mobilier du salon:; non, elle rachèterait des meubles – en velours beige.

Et elle aurait du papier à lettres bleu avec des bords frangés, et en haut son nom et cette adresse si raffinée en beaux caractères calligraphiés:: Grace Vanbridge Wexler, Tours du Soleil Couchant, Rive du Lac.

The Westing Game

Ellen Raskin

The Westing Game
Extrait

Les Tours du Soleil Couchant

Le soleil se couche à l’ouest (tout le monde sait ça), mais les Tours du Soleil Couchant faisaient face à l’est. Étrange:!

Les Tours du Soleil Couchant faisaient face à l’est et n’avaient pas de tours. Tout de verre et de scintillance, cet immeuble d’appartements se dressait seul sur la rive du lac Michigan, du haut de ses cinq étages. De ses cinq étages encore inoccupés.

Et puis, un jour (qui s’avéra être le 4 juillet), un garçon de courses pas comme les autres parcourut la ville à vélo pour glisser une lettre sous les portes des futurs locataires. Des lettres signées Barney Nordrup.

Le garçon de courses avait soixante-deux ans, et Barney Nordrup n’existait pas.

Chers chanceux::

Le voilà enfin, l’appartement de vos rêves:! À un loyer abordable, dans la résidence la plus récente et la plus luxueuse du lac Michigan::
Les Tours du Soleil Couchant

• Fenêtres panoramiques dans toutes les pièces
• Portier en uniforme, service de ménage
• Climatisation centrale, ascenseur ultra-rapide
• Quartier privilégié, proche d’excellentes écoles
• Etc., etc.
Il faut le voir pour le croire. Ces appartements extraordinaires sont à visiter exclusivement sur rendez-vous. Il n’en reste que quelques-uns, alors ne tardez pas:!!! Appelez-moi sans attendre au 276–7474 pour profiter de cette affaire en or.

Votre obligé,
Barney Nordrup

P.-S. Je loue aussi des espaces idéalement conçus pour::
• Un cabinet médical
• Un café avec entrée sur le parking
• Un restaurant chic, sur tout le dernier étage

Six lettres furent déposées, seulement six. Six rendez-vous furent pris, et l’un après l’autre, famille après famille, bla bla bla, Barney Nordrup fit visiter les coins et recoins des Tours du Soleil Couchant.

« Regardez-moi ces vitres. Elles sont sans tain, dit Barney Nordrup. Vous pouvez voir dehors mais de dehors, personne ne peut vous voir.:»

Levant les yeux, les Wexler (premier rendez-vous de la journée) furent aveuglés par le soleil matinal qui illuminait la façade du bâtiment.

« Vous voyez ces lustres:? C’est du cristal:!:», lança Barney Nordrup en lissant sa moustache noire, puis rajustant sa cravate multicolore devant les nombreux miroirs du hall de l’immeuble:: « Et cette moquette, hein:? Sept centimètres d’épaisseur:!

— Magnifique:!:», répondit Madame Wexler, qui s’agrippait au bras de son mari car ses hauts talons vacillaient dans les longues fibres.
Elle aussi jeta un coup d’œil approbateur à son reflet avant que les portes de l’ascenseur ne s’ouvrent.

« Vous avez de la chance, déclara Barney Nordrup. Il ne me reste qu’un seul appartement, mais vous allez l’adorer. Il est fait pour vous:!:» Il ouvrit grand la porte de l’appartement 4C. « Alors, c’est à couper le souffle, ou c’est à couper le souffle:?:»

Madame Wexler en resta bouche bée:; c’était en effet à couper le souffle. Deux des murs du salon étaient vitrés du sol au plafond. Emboîtant le pas à Barney Nordrup, elle lança joyeusement nombre de « ah:» et de « oh:» à travers l’appar­tement.

Son mari, qui suivait, avait l’air moins enthousiaste.

« C’est quoi ça, une chambre ou un placard:? demanda Jake Wexler, en inspectant la dernière pièce.

— C’est une chambre, bien sûr:! répondit sa femme.

— Ça ressemble à un placard.

— Allons, Jake, cet appartement est parfait pour nous, vraiment parfait:», soutint Grace Wexler dans un roucoulement geignard. La troisième chambre était sans doute un peu petite, mais ça irait très bien pour Turtle. « Et pense à ce que ça fera d’avoir ton cabinet dans le même immeuble. Finis les allers-retours en voiture pour aller au travail:; plus besoin de tondre la pelouse ou de déneiger l’allée:!

— Permettez-moi de vous rappeler, fit Barney Nordrup, que le loyer ici est plus bas que ce que vous coûte l’entretien de votre maison actuelle.:»

Jake se demanda comment il pouvait savoir ça.Grace se tenait devant la baie vitrée qui, au-delà de la route, au-delà des arbres, donnait sur le lac Michigan, calme et brillant. Une vue sur le lac:! Attendez un peu que ses soi-disant amies avec leurs belles demeures voient cet endroit. Il faudrait faire retapisser le mobilier du salon:; non, elle rachèterait des meubles – en velours beige.

Et elle aurait du papier à lettres bleu avec des bords frangés, et en haut son nom et cette adresse si raffinée en beaux caractères calligraphiés:: Grace Vanbridge Wexler, Tours du Soleil Couchant, Rive du Lac.

 
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Les Tours du Soleil Couchant

Le soleil se couche à l’ouest (tout le monde sait ça), mais les Tours du Soleil Couchant faisaient face à l’est. Étrange:!

Les Tours du Soleil Couchant faisaient face à l’est et n’avaient pas de tours. Tout de verre et de scintillance, cet immeuble d’appartements se dressait seul sur la rive du lac Michigan, du haut de ses cinq étages. De ses cinq étages encore inoccupés.

Et puis, un jour (qui s’avéra être le 4 juillet), un garçon de courses pas comme les autres parcourut la ville à vélo pour glisser une lettre sous les portes des futurs locataires. Des lettres signées Barney Nordrup.

Le garçon de courses avait soixante-deux ans, et Barney Nordrup n’existait pas.

Chers chanceux::

Le voilà enfin, l’appartement de vos rêves:! À un loyer abordable, dans la résidence la plus récente et la plus luxueuse du lac Michigan::
Les Tours du Soleil Couchant

• Fenêtres panoramiques dans toutes les pièces
• Portier en uniforme, service de ménage
• Climatisation centrale, ascenseur ultra-rapide
• Quartier privilégié, proche d’excellentes écoles
• Etc., etc.
Il faut le voir pour le croire. Ces appartements extraordinaires sont à visiter exclusivement sur rendez-vous. Il n’en reste que quelques-uns, alors ne tardez pas:!!! Appelez-moi sans attendre au 276–7474 pour profiter de cette affaire en or.

Votre obligé,
Barney Nordrup

P.-S. Je loue aussi des espaces idéalement conçus pour::
• Un cabinet médical
• Un café avec entrée sur le parking
• Un restaurant chic, sur tout le dernier étage

Six lettres furent déposées, seulement six. Six rendez-vous furent pris, et l’un après l’autre, famille après famille, bla bla bla, Barney Nordrup fit visiter les coins et recoins des Tours du Soleil Couchant.

« Regardez-moi ces vitres. Elles sont sans tain, dit Barney Nordrup. Vous pouvez voir dehors mais de dehors, personne ne peut vous voir.:»

Levant les yeux, les Wexler (premier rendez-vous de la journée) furent aveuglés par le soleil matinal qui illuminait la façade du bâtiment.

« Vous voyez ces lustres:? C’est du cristal:!:», lança Barney Nordrup en lissant sa moustache noire, puis rajustant sa cravate multicolore devant les nombreux miroirs du hall de l’immeuble:: « Et cette moquette, hein:? Sept centimètres d’épaisseur:!

— Magnifique:!:», répondit Madame Wexler, qui s’agrippait au bras de son mari car ses hauts talons vacillaient dans les longues fibres.
Elle aussi jeta un coup d’œil approbateur à son reflet avant que les portes de l’ascenseur ne s’ouvrent.

« Vous avez de la chance, déclara Barney Nordrup. Il ne me reste qu’un seul appartement, mais vous allez l’adorer. Il est fait pour vous:!:» Il ouvrit grand la porte de l’appartement 4C. « Alors, c’est à couper le souffle, ou c’est à couper le souffle:?:»

Madame Wexler en resta bouche bée:; c’était en effet à couper le souffle. Deux des murs du salon étaient vitrés du sol au plafond. Emboîtant le pas à Barney Nordrup, elle lança joyeusement nombre de « ah:» et de « oh:» à travers l’appar­tement.

Son mari, qui suivait, avait l’air moins enthousiaste.

« C’est quoi ça, une chambre ou un placard:? demanda Jake Wexler, en inspectant la dernière pièce.

— C’est une chambre, bien sûr:! répondit sa femme.

— Ça ressemble à un placard.

— Allons, Jake, cet appartement est parfait pour nous, vraiment parfait:», soutint Grace Wexler dans un roucoulement geignard. La troisième chambre était sans doute un peu petite, mais ça irait très bien pour Turtle. « Et pense à ce que ça fera d’avoir ton cabinet dans le même immeuble. Finis les allers-retours en voiture pour aller au travail:; plus besoin de tondre la pelouse ou de déneiger l’allée:!

— Permettez-moi de vous rappeler, fit Barney Nordrup, que le loyer ici est plus bas que ce que vous coûte l’entretien de votre maison actuelle.:»

Jake se demanda comment il pouvait savoir ça.Grace se tenait devant la baie vitrée qui, au-delà de la route, au-delà des arbres, donnait sur le lac Michigan, calme et brillant. Une vue sur le lac:! Attendez un peu que ses soi-disant amies avec leurs belles demeures voient cet endroit. Il faudrait faire retapisser le mobilier du salon:; non, elle rachèterait des meubles – en velours beige.

Et elle aurait du papier à lettres bleu avec des bords frangés, et en haut son nom et cette adresse si raffinée en beaux caractères calligraphiés:: Grace Vanbridge Wexler, Tours du Soleil Couchant, Rive du Lac.

 
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